En France, Jacques Pradel fut à la télé poubelle ce que Céline Dion fut à la chanson braillarde : un précurseur. Avec Pascale Breugnot, ils ont compris très vite qu’on pouvait faire de l’audimat en montrant la vie des « vrais gens ». Le résultat fait peur.
Le nom de Jacques Pradel est avant tout associé à deux émissions : « Perdu de vue » et « témoin no 1 », ainsi qu’à un fou rire : L’affaire Roswell. Il demeure à ce titre la seule personne dont la carrière a pris fin à cause d’un extra terrestre.
Revenons donc un instant sur la carrière de Jacques Pradel : tout commence à la radio. Il anime des émissions avec Françoise Dolto, répondant aux questions anxieuses des mamans : mon bébé pleure tout le temps, mon fils n’a pas d’amis, est-ce lié au fait qu’il a la tête en triangle et deux gros yeux noirs, etc. Jusque là, tout allait bien, aucun petit martien en vue.
Puis, en 1991, c’est l’arrivée sur nos antennes de « Perdu de vue », une des émissions qui marqua le plus les gens et donna naissance à beaucoup de sketchs et parodies. Le principe est simple : votre tata a disparu avec l’héritage et vous voulez la retrouver ? Un petit coup de fil, Jacquot diffuse sa photo et raconte son histoire à la télé et les reporters aguerris de TF1 vont chercher Tata, qui s’était cachée dans le placard la coquine.
Le résultat est foudroyant : l’audimat monte, les critiques pleuvent, les lettres de spectateurs affluent, et France 2 se sent obligée de surenchérir dans la bêtise : c’est « les marches de la gloire » avec Laurent Cabrol, le Jacques Pradel du pauvre. « Perdu de vue » reste dans les annales comme une des émissions les plus racoleuses et les plus truquées, suspense oblige. C’était pourtant très moral, si on en croit son présentateur : "Nous rétablissons la communication coupée entre les personnes, entre les couples, c’est le nouvel âge de la télévision ».
Le nouvel âge de la télévision continue avec « Témoin no 1 », qui ferait passer « Perdu de vue » pour « Bouillon de culture ». Délation, dénonciation = télévision. Les spectateurs le comprennent vite et TF1 s’improvise Juge. Le n’importe quoi culmine lors de la fameuse émission en 1996 où l’équipe de « Témoin no 1 » prétend avoir résolu l’affaire de la profanation du cimetière de Carpentras. La rumeur fait office de preuve, merci Maître Collard. Déjà, à l’époque, la vérité était ailleurs.
La dernière émission commise par Jacques Pradel sur TF1 est « L’odyssée de l’étrange ». On revient sur des phénomènes paranormaux, et on explique que c’est vrai. Il y a eu une lumière dans le ciel ? Votre frère n’a que 9 orteils ? Appelez TF1. Tout cela culminera lors de l’affaire Roswell (voir lien) qui mit fin à la carrière de Pradel. Il prononça lors de l’autopsie de la bête sa phrase la plus célèbre « Je suis troublé ». Dérangé, même.